A force de voir toutes les restrictions prises en France à l’égard de la communauté musulmane, on en vient à se demander s’il s’agit d’un phénomène mondial ou bien si celui-ci est spécifique à l’hexagone. C’est une nouvelle fois de l’autre coté de l’océan Atlantique que nous allons pouvoir apprécier ce qui sépare un pays respectant la liberté religieuse à un pays s’adonnant à une chasse aux sorcières depuis plusieurs mois.

Nous vous laissons le soin de lire cette dépêche AFP à propos d’une polémique provoquée par l’organisation de la prière du Vendredi dans la cafétéria d’une école :

MONTREAL — La prière du vendredi menée par un imam dans la cafétéria d’une école publique de Toronto, métropole canadienne où vit une importante communauté musulmane, suscite la controverse dans un pays pourtant réputé pour ses accommodements avec les minorités.

La commission scolaire de Toronto, capitale de l’Ontario peuplée par plus de cinq millions d’habitants dont la moitié n’y sont pas nés, autorise depuis trois ans un imam à diriger la prière du vendredi dans la cafétéria de l’école d’enseignement secondaire de Valley Park.

« Entre 80 et 90% des élèves de l’école de Valley Park sont musulmans », explique à l’AFP Shari Schwartz-Maltz, porte-parole de la commission scolaire. Les parents ont donc demandé il y a trois ans à la direction de l’école de permettre aux élèves de faire la prière à l’école, plutôt que de se rendre à la mosquée et ainsi risquer de rater un cours.

La commission scolaire a donné sa bénédiction au projet et proposé que la prière se déroule dans la cafétéria après le repas, ce qui permettait aux enfants de pas rater de cours et évitait de voir environ 400 élèves sortir de l’école sans surveillance.

Mais des organisations locales, dont un influent groupe hindou, ont critiqué cette mesure cette semaine, ce qui a donné lieu à la publication de nombreux articles dans la presse torontoise. Les réactions d’hostilité ont aussitôt fusé.

« Parents et élèves non-musulmans: levez-vous! levez-vous! levez-vous! », exhorte un internaute sur le site du grand quotidien The Globe and Mail où cette affaire est la plus commentée mercredi.

« En trois ans, il n’y a eu aucune plainte. Nous sommes donc surpris » des réactions, a dit à l’AFP Mme Schwartz-Maltz.

La prière à la cafétéria ne fait pas l’unanimité chez les musulmans. « Nous le disons depuis le début et pas simplement parce que l’histoire défraye actuellement la chronique. Nous sommes opposés à cette mesure », a dit à l’AFP Salma Siddiqui, vice-présidente du Congrès musulman canadien, une organisation défendant une conception plutôt libérale de l’iIslam.

« C’est de la rectitude politique. Ils (la commission scolaire) veulent montrer qu’ils trouvent des accommodements. Aujourd’hui c’est cette religion qui a des revendications, mais demain ça en sera une autre. Où cela va-t-il s’arrêter? Comment pourrons-nous vivre ensemble en société ? », a-t-elle ajouté.

La prière était jadis obligatoire dans les écoles au Canada, mais depuis l’adoption de la charte des droits de la personne en 1982, elle a perdu ce statut, le principe de la « liberté de conscience et de religion » primant sur la tradition chrétienne du pays.

Le respect de la liberté de conscience a aussi forcé les institutions publiques à trouver des « accommodements », notamment religieux, pour les minorités au Canada, pays qui accueille environ 250.000 immigrés par an.

La Commission des droits de la personne du Québec avait par exemple demandé, en 2006, à une université d’ouvrir un lieu multiconfessionnel pour satisfaire les demandes d’étudiants musulmans. Et un grand débat avait eu lieu l’année suivante dans la province francophone sur les « accommodements », mais le Canada anglais était resté un peu en retrait de la polémique.

En vertu de la charte canadienne des droits et du code des droits de la personne de l’Ontario, l’école est « tenue » de fournir un lieu de culte aux élèves s’il y a une demande de leur part, a indiqué Mme Schwartz-Maltz. « Mais avant tout c’est un plaisir et un honneur de montrer aux enfants que nous valorisons qui ils sont ».

AFP